Le capital est un agrégat économique particulier. Une taxation excessive représenterait une menace majeure pour l’avenir de l’économie, mais aussi pour le travail et sa rémunération.
Le capital constitue l’un des agrégats économiques les plus emblématiques, mais aussi l’un des plus mal définis. De nombreuses imprécisions y sont attachées, ce qui laisse souvent les idéologies prendre le pas sur la théorie économique. Le capital correspond à un stock de biens entrant dans le processus de production, comme le travail. Il se compose de biens durables, matériels ou immatériels, tels que les machines, les brevets ou les bâtiments, mais il inclut également des actifs financiers indispensables au fonctionnement quotidien des entreprises. Il n’est donc pas possible d’observer directement le stock de capital d’une économie; on ne peut que l’estimer à partir des flux d’investissement. Ces derniers compensent en effet la perte de valeur du capital due à la dépréciation et augmentent ainsi la capacité de production future. En Belgique, l’investissement représente chaque année, en moyenne, près de 25% du produit intérieur brut (PIB).
Contrairement au facteur travail, l’investissement n’est pas censé être immédiatement profitable, mais seulement à l’avenir. Il comporte donc un risque qui doit se refléter dans sa rémunération. Taxer excessivement l’investissement entraîne dès lors une baisse de l’activité future, ce qui est moins vrai pour le travail. De plus, dans le monde globalisé actuel, le capital est extrêmement mobile, ce qui engendre une forte concurrence fiscale entre les pays. Le Portugal l’a bien compris en réduisant sa fiscalité afin d’attirer les capitaux étrangers et de sortir de la crise en 2009. Une hausse de la taxation aurait l’effet inverse, en particulier pour la Belgique qui, en 2024, figure déjà au quatrième rang des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) où la taxation moyenne du capital est la plus élevée.
L’investissement possède également une dimension publique. En Belgique, cette composante ne représente qu’environ 2,4% du PIB et à peine 5% de la dépense publique totale. La Belgique n’utilise donc pas l’investissement public comme un levier de création de valeur future, plutôt comme un instrument de soutien à l’activité présente. Une taxation supplémentaire viendrait dès lors accentuer la préférence pour le présent de l’Etat et renforcer son absence de stratégie orientée vers le long terme.
Le capital est souvent assimilé à la valeur boursière des entreprises. Or, très peu d’entre elles sont cotées sur les marchés financiers: en Belgique, seul 0,0125% des entreprises le sont, et à peine 7,5% de celles comptant plus de 250 employés. La majorité se finance grâce aux capitaux des fondateurs ou par le crédit bancaire et c’est seulement lorsque ces sources deviennent insuffisantes qu’elles s’introduisent en Bourse. La valeur boursière d’une société ne correspond donc pas à sa création de valeur ajoutée actuelle, mais à l’anticipation qu’en fait le marché. Une entreprise peut ainsi voir sa capitalisation boursière exploser avant même d’avoir généré la moindre production. Taxer cette valeur virtuelle, comme le propose la «taxe Zucman», reviendrait dès lors à taxer une valeur ajoutée future et incertaine, ce qui équivaudrait à une double taxation, à la fois ex ante et ex post. Le capital constitue donc un agrégat économique particulier. Une taxation excessive représenterait une menace majeure pour l’avenir de l’économie mais aussi pour le travail et sa rémunération.















