Instituteur retraité, ancien membre du Conseil Supérieur des CPMS, Bernard De Commer se demande pourquoi l’Education à la Vie Relationnelle Affective et Sexuelle (EVRAS), et en particulier le volet sexualité, dérange tant.
Dans une interview à la RTBF, Paul Magnette, bourgmestre de Charleroi déclare, à propos des incendies d’écoles suscités par l’EVRAS : « Ce sont des actes de barbarie absolue. De terrorisme. Tout sera mis en œuvre pour arrêter les auteurs. C’est d’une violence inouïe ! Imaginez les enfants de 2 ou 3 ans ne vont pas comprendre pourquoi on brûle leur école. Quand on s’attaque comme ça aux libertés publiques, à la liberté d’enseignement, quand on s’attaque à la tolérance en recourant à la violence. J’appelle ça des actes de barbarie et de terrorisme, il faut nommer les choses. » On ne peut évidemment qu’appuyer cette réaction et se poser la question du pourquoi tant de violences.
Ce fameux « cours » – en fait une animation – à hauteur de 2 heures en 6e primaire et en 4e secondaire – se veut une Education à la Vie Relationnelle Affective et Sexuelle. C’est une animation qui avait été introduite et généralisée dès 2012 par Marie-Dominique SIMONET et qui devrait être rendue obligatoire par décret incessamment. Personnellement, instituteur primaire, fin des années 70, avec le soutien d’une émission de la Télévision scolaire de la RTBF, j’ai abordé cette question. C’était aussi le cas dans de nombreux établissements. Les directions, parfois, exigeaient l’accord des parents.
A ce sujet, rappelons ici la position de l’UFAPEC (parents de l’enseignement catholique), une position de bon sens : « L’EVRAS est une dimension essentielle de la formation humaine et citoyenne de nos enfants tout au long de leur scolarité et dans tous les types d’enseignement. L’école, à côté de l’éducation nécessairement multiple proposée aux enfants dans chaque famille, a donc un rôle déterminant à jouer. Ceci afin de s’assurer que chaque enfant, chaque adolescent, développe une réflexion, des attitudes et un comportement, conscients des enjeux de société, de groupe, de partenaires ou d’identité en matière de vie relationnelle, affective ou sexuelle. Il s’agit en outre qu’il obtienne des pistes de réponses en fonction de ses besoins propres, à la fois individuels et relationnels. » (Etude menée par Michaël LONTIE en février 2017)
Il me semble que ce soit surtout le S qui pose problème. La sexualité, le sexe. Le vilain mot ! Pour moi qui ai connu et un peu vécu Mai 68, la libération sexuelle qui en fut une des conséquences, je ne m’explique pas les réactions de certains. Il est juste question avec EVRAS d’être à l’écoute des enfants et des jeunes qui se posent des questions et ne croient plus – s’ils y ont jamais cru- aux enfants nés dans les choux ou déposés par des cigognes. Et quand maman est enceinte, qu’elle a un gros ventre, comment cela s’est-il fait ? Et pourquoi ai-je un papa et d’autres pas ? Et cela dans une société où il suffit de regarder certaines affiches publicitaires ou spots à la télé pour se rendre compte que le S est bien présent sous une forme ou l’autre. Et je ne parle pas de la pornographie à laquelle beaucoup d’entre eux disent avoir été confrontés. L’amour, le sexe, ce n’est pas du tout cela.
Il faut le leur dire. Nos enfants, nos jeunes ne vivent pas dans un conte de fées, mais dans la société que nous leur avons bâtie. En 1905, Freud publie un essai : La sexualité infantile. Il y explique très clairement que les enfants, dès leur naissance, ont des pulsions sexuelles qu’ils vont modifier au cours de leur maturation, en passant du stade oral (la tétée) au stade génital. Cela dérangeait à l’époque, il semble que cela dérange toujours tout autant, quand je lis sur les réseaux sociaux des affirmations telles que celle-ci : les enfants n’ont pas de sexualité propre ; ce sont les adultes qui projettent sur eux des choses… Y compris leur propre malaise vis-à-vis du sexe ?
En fait, comme parents, il n’est pas toujours aisé de voir nos enfants tels qu’ils sont, d’accepter qu’ils grandissent, que parfois ils brisent les codes religieux et autres que nous leur imposons.
En conclusion, sans doute provisoire, EVRAS n’enlève en rien le rôle éducatif qui revient aux parents. EVRAS est complémentaire. Le guide n’est pas un absolu, juste un guide pour les animateurs, agents PMS et PSE (Promotion de la Santé à l’Ecole) et enseignants.
Bernard De Commer, instituteur retraité, ancien membre du Conseil Supérieur des CPMS
Le titre est de la rédaction, le titre original était « La nouvelle Croisade : sus à EVRAS »