La panique gagne Goma, à l’est du Congo, prise en tenaille par les rebelles du M23 qui pourraient s’emparer de la ville. L’attentisme occidental exaspère.
La guerre est à nouveau aux portes de Goma, la plus grande ville de l’est du Congo. La localité de Sake, à vingt kilomètres, a été bombardée, tout comme celle de Mugunga, dont le marché a été touché. Les deux millions d’habitants de la capitale du Nord-Kivu, coupée de ses voies de communication, sont pris en tenaille. Soutenus par le Rwanda voisin, les rebelles du M23 continuent leur progression sur un terrain où prolifèrent les groupes armés, les massacres et les déplacements de populations. La menace ne vient pas que de l’extérieur: Corneille Nangaa, l’ancien président de la commission électorale, a choisi l’opposition frontale au fraîchement réélu président Félix Tshisekedi en lançant une coalition politico-militaire, Alliance fleuve Congo… où l’on retrouve le M23.
Les joueurs clés sont africains, plus occidentaux.
Impuissant à pacifier l’est du pays, alors que c’était sa promesse à l’entame de son premier mandat, Félix Tshisekedi compte cette fois sur le soutien de militaires du Burundi voisin, en délicatesse avec le Rwanda, pour faire barrage aux insurgés. Kinshasa mise aussi sur les «wazalendo» (patriotes), des milices accusées par Kigali de collaborer avec les groupes armés hutus, descendants des auteurs du génocide des Tutsis et qui rêvent de renverser le régime de Paul Kagame. Le cocktail est d’autant plus explosif que la haine anti-Tutsi prolifère, alimentée depuis Kinshasa, et que les appétits de tous pour les ressources naturelles locales (or, coltan…) de la région sont insatiables.
Occupés par les deux fronts de l’Ukraine et du Proche-Orient, les pays occidentaux sont critiqués pour leur inaction. Pire, ils sont parfois accusés d’être les complices des rebelles. Résultat, des ambassades ont été attaquées et les diplomates doivent redoubler de prudence lors de leurs déplacements. A l’hôtel Memling de Kinshasa, des manifestants s’en sont pris aux drapeaux belge et européen qui flottent sur la façade, comme un écho à la colère antifrançaise dans des pays du Sahel. «Nous ne voulons plus voir des symboles de ces pays impérialistes qui font saigner le cœur des Congolais», commente avec virulence l’auteur de la vidéo diffusée sur TikTok.
«Tout le monde voit les massacres à l’est du Congo. Mais tout le monde se tait. Mettez la même énergie que vous mettez à parler de la CAN (NDLR: la Coupe d’Afrique des nations de football) pour mettre en avant ce qu’il se passe chez nous», a déclaré Cédric Bakambu, joueur de l’équipe nationale de football – laquelle a terminé quatrième du tournoi. Les joueurs eux-mêmes ont mis la main sur la bouche lors de l’hymne national.
Agir, mais comment? La coûteuse Monusco (mission de l’ONU au Congo) s’apprête à plier bagage après 25 années marquées par l’inefficacité. Quant à la Belgique, «elle n’a plus de levier sur la situation politico-sécuritaire du Congo, reconnaît un diplomate belge. Les joueurs clés sont africains, plus occidentaux.»