La compagnie aérienne Air Belgium a deux semaines pour éviter la faillite. En cas de (probable) cessation d’activités, près de 14.000 passagers et agences risquent de ne jamais être remboursés.
Il reste peu d’espoir à Air Belgium. Sous une procédure de réorganisation judiciaire (PRJ) depuis septembre 2023, et donc à l’abri de ses créanciers, l’opérateur aérien a comparu devant le tribunal de commerce de Nivelles. A l’issue de l’audience, mardi, il lui a expressément été demandé de régler ses ennuis financiers. Or, aucun nouvel investisseur n’a été trouvé et l’aide de l’exécutif wallon reste désormais peu probable.
Le tribunal lui a également accordé un délai supplémentaire de deux semaines – la PRJ devait prendre fin le 19 septembre 2024. Un potentiel investisseur inconnu se serait manifesté après la date limite. Mais l’avenir de la compagnie semble bien sombre.
Air Belgium avait cessé ses vols passagers opérés en propre «chroniquement non rentables» le 3 octobre 2023. L’opérateur s’est alors concentré sur deux pôles plus prometteurs, le transport de fret et l’affrètement d’avions pour d’autres transporteurs aériens. En vain. Suite à l’arrêt des vols passagers, son chiffre d’affaires a chuté de 40%. Il accuse aussi une perte annuelle de 22 millions d’euros.
Au terme de ces deux semaines de sursis et sans nouvel apport de capital, la faillite est inévitable. Le pire scénario pour les quelques 14.000 passagers ayant acheté un vol à Air Belgium ou un séjour tout compris auprès d’une agence ou d’un tour opérateur, programmé après l’arrêt des vols passagers. «C’est simple, en cas de faillite, il n’y aura aucun remboursement», pointe Jean-François Defour, vice-président de l’Union professionnelle de voyages (UPVA). Le passé lui donne raison: en cas de faillite d’une compagnie aérienne, les clients ne sont que très rarement considérés comme créanciers prioritaires par les tribunaux et leur cas est généralement étudié lorsqu’il ne reste plus aucun fonds.
Clients «blindés»
Les voyageurs de l’Union européenne sont cependant protégés par la directive du 11 décembre 2015. Elle prévoit un remboursement intégral pour tous les voyageurs ayant acheté au moins un transport et un hébergement, c’est-à-dire un forfait auprès d’une agence ou d’un tour opérateur. Cela comprend également les frais engendrés par les retards ou les annulations comme une nuit supplémentaire à l’hôtel.
En effet, à l’inverse d’une compagnie aérienne, tant une agence qu’un tour opérateur ont l’obligation de s’assurer contre l’insolvabilité financière. Pour ce faire, ils ont constitué un Fonds de garantie des voyages. Ce fonds de protection est financé par une commission prélevée sur chaque forfait voyage. Le gouvernement fournit, par ailleurs, une garantie d’Etat sur ce fonds en tant que mesure de sécurité supplémentaire. Grâce à l’intervention de ce fonds, des milliers de voyageurs ont ainsi été remboursés après la faillite du voyagiste Thomas Cook, en 2019.
Ici, ce sont donc les tours opérateurs et les agences de voyage qui en font les frais. «Nous avons dû trouver des solutions pour 9.357 voyageurs», précise Jean-François Defour. Le coût se chiffre à un peu plus de 5 millions d’euros (soit 5.151.141). Une charge importante pour les voyagistes, dont beaucoup sont des petites et des moyennes entreprises.
Clients sans filets
Les clients qui n’ont acheté qu’un billet d’avion à Air Belgium ne sont pas couverts par la directive européenne. «Selon nos estimations, ils sont 4.801 à avoir acheté un vol sec. Cela représente un montant de plus de 2,5 millions», détaille Jean-François Defour. Ils ne bénéficient d’aucun filet de protection, à moins d’avoir réglé avec une carte de crédit gold qui couvre ce type d’aléas.
Au total, la facture pourrait donc s’élever à près de 8 millions d’euros. Sans compter l’ardoise salée qu’Air Belgium laisse à la Région wallonne (près de 20 millions d’euros) et à l’aéroport de Charleroi (plus de 42 millions d’euros).
Lors de la prochaine mandature européenne, la directive sur les voyages à forfait devrait être revue. Dans ce contexte, les associations de consommateurs et les professionnels du voyage réitèrent, une fois encore, auprès de la Commission européenne leur demande d’obliger les compagnies aériennes à souscrire une assurance contre l’insolvabilité financière et de créer une caisse de garantie. «Le secteur aérien se montre de plus en plus instable financièrement et les faillites se multiplient ces dernières années», conclut Jean-François Defour.
La facture totale pourrait s’élever à près de 8 millions d’euros