Le climatologue belge Jean-Pascal van Ypersele, candidat malheureux à la présidence du Giec, a écrit une lettre ouverte « au nom du climat » adressée au président de la COP28, la conférence climat de l’Onu qui se déroule jusqu’au 12 décembre à Dubaï (Émirats arabes unis).
Dans cette missive, co-signée par le climatologue américain Michael E. Mann, directeur du « Earth System Science Center » à l’université d’État de Pennsylvanie, M. van Ypersele entend rappeler « quelques données scientifiques essentielles » à Sultan Al Jaber, le président controversé de la COP28, également à la tête de la compagnie pétrolière émiratie Adnoc. « Nous sommes désolés de devoir vous informer que vous avez devant vous des représentants du partenaire le plus intraitable, celui qui ne vous propose que des lignes rouges et n’a absolument aucune flexibilité. Ce partenaire c’est le système climatique et il n’obéit qu’aux lois de la nature (la physique, la chimie et la biologie) », pose d’emblée l’auteur de la lettre ouverte.
Le climatologue de l’UCLouvain martèle ensuite, comme le préconisent les rapports des scientifiques du Giec, l’importance cruciale de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C par rapport à l’ère pré-industrielle pour restreindre les pertes et préjudices dues au dérèglement climatique et « pour que l’adaptation reste tout simplement possible. » « Aujourd’hui déjà, nous constatons une augmentation des pertes et des dommages, même avec un réchauffement de 1,2°C. Le débat sur les pertes et les dommages ne serait pas aussi difficile aujourd’hui si le réchauffement avait été stoppé plus tôt. »
« Le système climatique ne fait pas de politique. Il ne joue pas avec les mots. Ce qu’il ressent et ce qu’il comprend, c’est l’émission ou l’absorption réelle de molécules de gaz à effet de serre », poursuivent les auteurs de la lettre ouverte, soulignant la nécessité que la concentration de CO2 dans l’atmosphère cesse d’augmenter d’ici 2050 au plus tard. « Cela signifie qu’il faut parvenir à des émissions nettes de CO2 qui soient nulles, c’est-à-dire que tout le CO2 qui est émis doit être absorbé, principalement par la nature, et cela au plus tard en 2050, tout en réduisant considérablement les émissions d’autres gaz à effet de serre (méthane, etc.). »
L’objectif de zéro émission nette à l’échelle mondiale d’ici à 2050 signifie aussi que l’Union européenne, les États-Unis et d’autres pays développés doivent atteindre le niveau de zéro émission nette « bien avant 2050, pour des raisons d’équité », estiment encore les deux climatologues.
« Au nom du système climatique, voici notre ligne rouge: l’humanité doit se mettre d’accord sur l’élimination des combustibles fossiles d’ici à 2050 et sur l’arrêt de la déforestation nette dans le même temps », concluent les deux scientifiques.