dimanche, janvier 5

Prendre de bonnes résolutions en début d’année, c’est bien. Les respecter, c’est mieux. A condition, toutefois, de ne pas fixer de buts irréalistes. Et aussi de ne pas vouloir les atteindre au risque de mettre en danger sa santé physique et mentale. La chercheuse en psychologie Céline Douilliez suggère d’employer la méthode SMART.

En début d’année, emplis de bonnes intentions, chacun se fait une promesse à soi-même: celle de respecter les bonnes résolutions prises le 31 décembre durant les douze mois suivants. Faire plus de sport, manger moins de viande, prendre plus de temps pour soi, voyager davantage, arrêter de fumer, passer moins de temps devant les écrans, lire plus… Chacun ses objectifs.

Mais pourquoi, alors que des études montrent que la majorité des personnes prenant de bonnes résolutions les abandonnent au cours de l’année, s’obstine-t-on encore et toujours à se fixer des objectifs à l’entame de chaque nouvelle année? D’après Céline Douilliez, chercheuse en psychologie clinique à l’Université catholique de Louvain, ces résolutions de janvier sont «liées à notre tentative de nous motiver à atteindre des buts qui sont importants pour nous». Mais c’est aussi une affaire culturelle. Les premières traces de ce que l’on nomme désormais de «bonnes résolutions» datent de l’époque babylonienne, il y a plus de 4.000 ans, indique la psychologue. Qui ajoute: «Avec l’avènement des réseaux sociaux, cette tradition est rendue visible et s’observe à travers le monde.»

Quant à la date du 1er janvier, elle n’est pas choisie au hasard. Elle marque un moment de transition, un passage d’une année civile à une autre. Cependant, s’il est souvent question des bonnes résolutions de la nouvelle année, certains décident d’en prendre à d’autres moments. En septembre, au début d’une nouvelle année scolaire, par exemple, lors d’un anniversaire ou du passage d’une décennie à une autre. «C’est un moment où nous sommes invités à faire le bilan de la période écoulée, de ce qui a fonctionné et à réfléchir à ce que nous souhaiterions voir évoluer pour la période à venir», commente Céline Douilliez.

Pourquoi autant d’échecs?

Toutefois, comme évoqué plus haut, si 40 à 70% des individus prennent au moins une bonne résolution lors du passage à l’an neuf, la majorité a tendance à ne pas tenir ses bonnes résolutions. «Il y a un écart entre nos intentions et nos actions, qui ne se limite pas aux « bonnes résolutions de Nouvel An », mais à toutes nos tentatives de changer nos comportements», indique la professeure de l’UCLouvain. «Il faudrait plusieurs tentatives avant de pouvoir tenir ces bonnes résolutions. Heureusement, la majorité des personnes apprennent quand même certaines choses qui pourront leur être utiles lors de leur prochaine tentative.»

Il est important de se désengager de buts inatteignables pour préserver sa santé mentale et physique.

Céline Douilliez

Chercheuse en psychologie clinique à l’UCLouvain

Les mécanismes à l’œuvre dans l’échec de ces résolutions de la nouvelle année sont les mêmes que lors de l’échec d’un but à atteindre: les objectifs fixés sont trop généraux, trop abstraits. Être plus en forme, être plus sociable, prendre mieux soin de sa santé, réduire son empreinte écologique, c’est bien, mais les options pour y parvenir sont nombreuses, et il est difficile pour le commun des mortels de parvenir à tenir toutes ces promesses faites à soi-même. «Une fois la bonne résolution prise, nous ne suivons pas vraiment nos progrès dans l’atteinte de cet objectif et nous nous laissons facilement distraire de notre objectif lorsque nous rencontrons des obstacles», ajoute Céline Douilliez.

Des buts aux conséquences négatives

Ne pas tenir les objectifs qui ont été fixés peut avoir des conséquences psychologiques négatives, comme une baisse de l’estime de soi. Cela peut, à terme, mener à un sentiment de découragement: «Je n’ai pas réussi à tenir à mes résolutions, je n’ai pas réussi à changer, et je n’y parviendrai jamais. Cela ne vaut donc pas la peine d’essayer.»

Par ailleurs, sans même évoquer un échec, si le fait de faire des efforts pour respecter ses bonnes résolutions n’est pas un problème en soi, cela le devient quand la notion du «à tout prix» entre en jeu. En effet, certains objectifs, comme le fait de perdre vingt kilos en deux mois, par exemple, sont inatteignables. Il se peut aussi que le contexte change. Une personne souhaite courir son tout premier marathon et se donne six mois pour y parvenir. Elle met toutes les chances de son côté, et l’objectif est accessible. Mais à force d’entraînements acharnés, elle finit par se blesser. «Vouloir maintenir nos résolutions devient alors inadapté et peut avoir des conséquences psychologiques, voire physiques néfastes», souligne Céline Douilliez. «Il est important de se désengager de buts inatteignables pour préserver sa santé mentale et physique, mais aussi pour pouvoir réorienter notre énergie vers d’autres buts plus réalistes.»

A l’inverse, et de manière générale, lorsqu’un but est atteint, naît une émotion positive qui booste la confiance en soi de l’individu. «Chez certaines personnes, cependant, comme les personnes perfectionnistes, atteindre un but peut parfois mener à se fixer rapidement un autre objectif plus élevé, avec le piège de toujours devoir faire plus ou mieux», commente celle qui a fait du perfectionnisme d’un de ses sujets d’étude.

La méthode SMART

Pour mettre toutes les chances de son côté et atteindre les objectifs fixés par ces bonnes résolutions, et obtenir satisfaction, Céline Douillez suggère de choisir des résolutions importantes pour soi-même, en accord avec ses valeurs et motivantes. Pour cela, la chercheuse en psychologie conseille d’appliquer la méthode SMART (NDLR: Spécifique, Mesurable, Atteignable, Réaliste, Temporellement défini):

«Il s’agit de définir un but qui est spécifique (« réduire de moitié mon usage de la voiture », plutôt que « réduire mon empreinte écologique »), mesurable (le nombre de kilomètres parcourus), atteignable (à la campagne, me passer entièrement de ma voiture serait irréaliste, mais réduire mon usage de moitié l’est beaucoup plus), pertinent (je choisis un objectif qui a du sens pour moi), et temporellement défini (je définis un délai pour l’atteinte de mon objectif, par exemple six mois ou même un an).»

La plupart de nos bonnes résolutions concernent un changement de nos habitudes et cela n’est jamais facile.

Céline Douilliez

Chercheuse en psychologie clinique à l’UCLouvain

Céline Douilliez ajoute qu’il n’est pas forcément nécessaire de prendre des bonnes résolutions lors du passage à l’an neuf. Mais qu’en cas de buts à atteindre, ceux-ci doivent être formulés en ayant conscience des pièges dans lesquels il est facile de tomber. En retenant plusieurs choses: une bonne résolution, c’est une résolution qui n’est pas irréaliste, qui est motivante et qui a du sens pour la personne. «La plupart de nos bonnes résolutions concernent un changement de nos habitudes et cela n’est jamais facile», conclut-elle. Et ça aussi, il faut en prendre conscience.

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