La tempête Ciaran, qui frappe la Belgique et (surtout) la France est qualifiée de « bombe météorologique ». Le phénomène est-il pour autant exceptionnel et faut-il y voir une conséquence directe du réchauffement climatique ? Cinq questions au climatologue Hugues Goosse (UCLouvain).
Elle nous amène le vent. Ciaran attaque (la Belgique). La « puissante » tempête automnale fait craindre d’importants dégâts et perturbations. En France, des vents records ont été mesurés, alors que l’Angleterre et les Pays-Bas sont également impactés. En Belgique, l’IRM a émis une alerte orange pour la Côte et la Flandre occidentale, jaune pour le reste des provinces belges. Le bilan provisoire fait état de des morts, dont un enfant. Comment s’est formée la tempête Ciaran, à quel point est-elle inédite pour la Belgique et peut-on y voir une conséquence du réchauffement climatique? Le point en cinq questions avec le climatologue Hugues Goosse, professeur à l’UCLouvain et directeur de recherche FNRS.
Comment expliquer la cause de la tempête Ciaran ? Comment se forme-t-elle ?
Hugues Goosse : « Toutes les tempêtes se créent de la même manière : une dépression se creuse plus ou moins rapidement. En ce moment, ces phénomènes se renforcent en raison des différences de température très élevées entre l’équateur et les pôles. L’automne est ainsi la saison où l’on retrouve souvent le plus de tempêtes car la période rassemble des conditions favorables à la création de dépressions. »
La tempête Ciaran est qualifiée de bombe cyclonique ou de bombe météorologique, qu’est-ce que cela signifie ?
Hugues Goosse : « Ce sont des termes spectaculaires pour, en réalité, parler d’une dépression qui peut se créer rapidement et devenir particulièrement forte. Quand vous avez des phénomènes naturels, ils peuvent parfois être plus rapides et plus intenses que la moyenne. C’est le cas de Ciaran. Parler de bombe météorologique est donc une manière imagée – un peu forte – pour dire que dans certaines circonstances, les dépressions peuvent se creuser plus rapidement et devenir plus importantes. »
A l’échelle de la Belgique, on n’a pas de preuve que les tempêtes deviennent plus nombreuses et plus intenses en raison du réchauffement climatique. Les tempêtes d’automne ne sont pas comparables aux canicules ou aux précipitations extrêmes, pour lesquelles on peut prévoir une amplification.
Hugues Goosse
Pourquoi en parle-t-on autant ? Sa puissance est inédite pour la Belgique ?
Hugues Goosse : « L’impact de cette tempête est loin d’être inédit pour la Belgique. D’ailleurs, nous restons en alerte jaune ou orange. En revanche, des records sont battus en France. En fait, tout dépend de l’endroit où passe la dépression et de la trajectoire de son creux maximum.
Ces zones dépressionnaires prennent vie sur l’Atlantique. Les régions côtières sont logiquement davantage touchées que les régions continentales. La tempête a tendance à s’affaiblir une fois les côtes passées. Ensuite, la trajectoire de la dépression peut être dictée par la direction des vents. »
Peut-on y voir une conséquence directe du réchauffement climatique ? Et doit-on s’attendre à une multiplication de ce genre de phénomènes à l’avenir ?
Hugues Goosse : « D’un côté, oui, on doit s’attendre à ce que cela se reproduise. Dans le sens où cela s’est toujours produit. A l’échelle de la Belgique, on n’a en tout cas pas de preuve que les tempêtes deviennent plus nombreuses et plus intenses en raison du réchauffement climatique. C’est quelque chose qui est encore très difficile à prévoir. Les tempêtes d’automne ne sont pas comparables aux canicules ou aux précipitations extrêmes, pour lesquelles on peut prévoir une amplification. »
On parle parfois de tempête, de cyclone, d’ouragan ou de typhon. Comment différencier ces termes ?
Ils ont tous une définition relativement proche. Les ouragans ou les typhons sont des dépressions tropicales. Quand elles atteignent une certaine intensité, elles prennent le terme d’ouragan dans l’Atlantique et de typhon dans le Pacifique. C’est donc juste une question d’océan.
Concernant la tempête, elle résulte d’une dépression venant des moyennes latitudes, qui sont en général moins intenses.