L’arrestation de l’opposant politique d’Erdogan, Ekrem Immamoglu, a provoqué une vague contestatrice inédite en Turquie.
La foule s’est retrouvée à la mi-journée sous un ciel bleu sur la rive asiatique de la métropole « pour poursuivre la marche vers le pouvoir », selon l’appel du chef du Parti républicain du peuple (CHP), Özgür Özel, qui a estimé à 2,2 millions le nombre de manifestants.
Les manifestants, munis du drapeau turc et de portraits de Mustafa Kemal Atatürk, le père de la nation, scandent « Taksim est partout, la résistance est partout! » en référence à la place stambouliote, épicentre du vaste mouvement de contestation de Gezi en 2013. Parmi eux: l’épouse, la mère et les deux fils d’Ekrem Imamoglu.
L’arrestation de M. Imamoglu le 19 mars a déclenché une vague de protestations inédite en plus d’une décennie à travers la Turquie, mobilisant des dizaines de milliers de manifestants chaque soir dans les rues, jusqu’à lundi soir.
Depuis, le parti a cessé de convoquer la foule devant la municipalité. Mais dans un entretien au quotidien français Le Monde, daté de samedi, Özgür Özel, devenu le porte-voix de l’opposition, annonce la tenue de rassemblements réguliers à venir.
Rappelant qu’ils ont été interdits par les autorités dès l’arrestation du maire, le chef du parti kémaliste se dit prêt à « prendre le risque de passer huit, dix ans en prison s’il le faut. Parce que si nous ne repoussons pas cette tentative de coup d’Etat, il en sera fini des urnes ».
Le CHP s’apprêtait à investir M. Imamoglu comme son candidat pour la prochaine présidentielle prévue en 2028 quand il a été arrêté le 19 mars et envoyé en prison cinq jours plus tard.
En ce début du long week-end de l’Aïd el Fitr, qui sera célébré dimanche pour marquer la fin du ramadan, le rassemblement de samedi a donc valeur de test pour l’opposition alors que de nombreux stambouliotes auront quitté la ville pour être en famille.
D’autant que le président Recep Tayyip Erdogan a annoncé cette semaine l’octroi de neuf jours de congés aux fonctionnaires et institutions publiques.
Si les jeunes et les étudiants surtout ont tenté de poursuivre la mobilisation, la répression qui continue avec des arrestations, chez eux à l’aube, de manifestants, journalistes, avocats pourrait rebuter les plus déterminés.
Rien qu’à Istanbul, 511 étudiants avaient déjà été interpellés vendredi, dont 275 incarcérés, selon l’avocat Ferhat Güzel, pour qui « ce nombre est probablement beaucoup plus élevé ».
Selon les derniers chiffres officiels, plus de 2.000 personnes ont été arrêtées dont 260 avaient été incarcérées.