vendredi, novembre 22

Faire ralentir les conducteurs reste un casse-tête dans certaines communes, notamment aux abords des écoles. Le dispositif appelé feu rouge « à l’espagnole» a conquis certaines communes, mais demande un vrai aménagement, plaide l’agence de sécurité routière Vias.

La multiplication des zones limitées à 30 km/h en ville doit s’accompagner de contrôles et de dispositifs adaptés, pour en assurer le respect. Dans cette optique, certaines communes ont décidé de tester une arme encore relativement peu présente en Belgique: le feu rouge dit «à l’espagnole».

Ces feux tricolores fonctionnent sur un principe «punitif», en passant au rouge lorsqu’ils détectent des conducteurs dépassant la vitesse autorisée, pour les arrêter quelques secondes, et restant vert pour les automobilistes plus respectueux du code de la route. Ils se sont popularisés en Espagne ou au Portugal depuis longtemps, notamment aux abords des villages pour faire ralentir la circulation, d’où leur appellation.

Présents notamment à Auderghem depuis plusieurs mois maintenant, deux feux rouges de ce type semblent rencontrer une certaine approbation, avenue Chaudron et avenue du Parc de Woluwe. Ils sont installés aux abords d’écoles, afin de mieux sécuriser les lieux. «Nous avons de bons retours des parents, des écoles mais également des riverains dans l’ensemble», se réjouit Matthieu Pillois (DéFI), échevin de la mobilité de cette commune bruxelloise.

L’idée de la commune était de faire de la prévention, sans tomber immédiatement dans la sanction financière avec l’installation d’un radar qui flasherait les contrevenants. «Ce feu peut clairement participer à conscientiser les automobilistes sur le long terme et les forcer à adapter leur vitesse à l’approche de ce dispositif. Mais cela demande du temps pour changer des habitudes», poursuit l’échevin.

Pas possible à chaque coin de rue

Pas question d’en placer en masse, à chaque coin de rue, ajoute encore Matthieu Pillois, «mais d’autres installations du genre pourraient être étudiées». Son parti, reconduit dans la majorité à Auderghem lors des élections il y a quinze jours, avait proposé de continuer à travailler sur la sécurisation aux abords d’école, donc de réutiliser éventuellement ce genre de feu «à l’espagnole» si cela se justifie. «Le choix d’un des précédents lieux d’installation s’est notamment fait sur base d’une demande d’un comité de quartier, dans une rue où se trouvent deux écoles, dans une longue ligne droite en descente. D’autres demandes pourraient remonter du terrain pour choisir de potentiels coins problématiques», explique-t-il.

Car ces feux ne sont pas fait pour réguler la circulation à un carrefour, mais bien pour faire de la prévention et amener les conducteurs à respecter les limitations de vitesse à un endroit bien particulier.

Un objectif sur lequel Vias, l’institut pour la sécurité routière, se montre assez réservé. «Le risque est de voir certains automobilistes accélérer pour passer avant que le feu ne passe au rouge, ce qui est totalement contre-productif, avertit le porte-parole Benoît Godart. La crainte existe aussi de voir qu’une fois l’endroit connu, les conducteurs y ralentissent pour pouvoir passer au vert avant de réaccélérer plus loin. Et enfin, le dispositif punit parfois injustement, par exemple ceux qui suivent des conducteurs roulant trop vite alors qu’eux-mêmes respectent la vitesse autorisée. Ils se retrouveront bloqués à cause des autres, sans être en tort.»

Encadrer le dispositif et informer les conducteurs

Celui-ci se montre également très circonspect sur l’aménagement autour d’un des feux qu’il a visité à Auderghem. «Il semble que le dispositif devrait capter la vitesse plus tôt, afin d’être sûr de pouvoir stopper les conducteurs roulant trop vite, sinon le risque existe de voir des conducteurs accélérer pour vite passer ou au contraire ralentir très brusquement en dernière minute. Sans expliquer aux automobilistes pourquoi ils sont arrêtés, avec un panneau ou autre, l’objectif pédagogique est probablement loupé également», déplore-t-il.

Une critique pas totalement justifiée, selon l’échevin de la mobilité. «Nous avions communiqué largement lors de l’installation du feu, via les canaux officiels de la commune et également via l’école, à l’attention des parents. Mais l’idée est aussi d’avoir un petit effet de surprise, pour interroger les conducteurs. Si l’endroit est trop connu et qu’il ne produit plus d’effet, il faudra réinterroger son utilité.»

Le feu «à l’espagnole» n’est donc qu’une arme parmi d’autres, qu’il convient d’accompagner, selon Vias, pour produire des effets concret. D’autres communes, dont Woluwe-Saint-Lambert et Watermael-Boitsfort, ont également testé l’appareil, avec des chiffres positifs jugeait la première, qui a constaté une diminution des infractions et plus aucun accident grave sur l’axe concerné.

«Ces chiffres montrent que ce dispositif peut être une bonne idée, occasionnellement, dans des endroits particuliers, mais nécessairement avec un encadrement suffisant», conclut le porte-parole de Vias.

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