L’Arizona a hésité, mais la N-VA et Jan Jambon ont confirmé que l’utilisation du datamining par le SPF Finances figurera bien dans la loi-programme encadrant le budget 2026. Et ce malgré un avis très négatif de l’Autorité de protection des données (APD)… Et du MR.
Imaginez que, afin de lutter contre la cybercriminalité par exemple, la police passe au crible chaque ordinateur, chaque téléphone et chaque disque dur de chaque belge. L’inspection se ferait par une intelligence artificielle qui masquerait les données privées dans l’appareil. En revanche, si un soupçon pesait sur un appareil, elle en informerait la police qui pourrait dès lors ouvrir une enquête sur base des données privées décryptées. C’est plus ou moins ce que souhaite faire le gouvernement Arizona pour lutter contre la fraude sociale et fiscale.
Mardi encore, le gouvernement avait inscrit (suivant la volonté de Vooruit) un amendement intégrant le datamining au sein du PCC (Point de Contact Central). En français, il s’agit de permettre à des agents du SPF Finances d’observer des données de l’ensemble des comptes inscrits en Belgique (ceux-ci étant inscrits au Point de Contact Central). La masse de données traitées est considérable. Jusqu’ici, il était possible pour le SPF d’avoir accès à ces données à condition de vérifier un soupçon de fraude. D’une pratique réactive, l’Arizona opte donc pour une stratégie préventive diront certains, de surveillance de masse diront d’autres. C’est le cas de l’APD. «L’intégration complète des données du PCC dans le ‘data warehouse’ du SPF Finances pour du datamining et du matching constitue une ingérence particulièrement grave dans les droits et libertés des personnes concernées, taclait déjà l’Autorité de Protection des Données dans un avis rendu au printemps dernier. Les auteurs du projet ne parviennent pas à justifier suffisamment la nécessité et la proportionnalité de cette mesure.»
De plus, lit-on dans la justification de l’amendement qui est parvenu au Vif, le gouvernement intégrera les données financières d’origine étrangère qui ont déjà été reçues automatiquement par l’administration dans le PCC, ainsi que les comptes de joueurs de jeux de pari en ligne dépassant 10.000 euros. D’autres informations seront également intégrées au maximum dans le PCC pour permettre le datamining.
Dans l’opposition (et particulièrement au sein de l’Open VLD), mais surtout au sein de la majorité, l’inquiétude est palpable. Elle rend même le projet fébrile puisque ce mardi, suite à une réunion de majorité, l’amendement gouvernemental avait disparu du projet de loi suite à des pressions venues du MR. Mais la mesure fait partie d’un grand deal, et constitue une monnaie précieuse pour Vooruit qui a menacé de ne pas soutenir le projet de loi global au Parlement si cette mesure ne s’y trouvait pas.
Point gagné pour les socialistes flamands, pour le moment, qui ont finalement obtenu l’inscription de l’amendement dans la loi portant des dispositions diverses. «Nous ne pouvons pas accepter l’idée d’une surveillance de masse dans laquelle tout citoyen serait par défaut considéré comme un coupable en puissance, prévenait pourtant le député de la commission Finances et budget, Mathieu Michel (MR), en juin dernier. Appliquer des algorithmes d’analyse sur le compte en banque de tous les Belges n’est selon nous pas acceptable.» Seulement, l’assouplissement de l’accès au PCC afin de déceler des fraudes figure dans l’accord de gouvernement, ce que Vooruit ne manquera pas de faire valoir. Ce jeudi encore, il apparaît que le MR se bat seul contre Vooruit et désormais contre le CD&V au sein du gouvernement.
La séquence n’est pas encore conclue pour autant, paraît-il, et dégage un parfum de tension semblable à celui de la taxe sur les plus-values.















