Après des études de kinésithérapie, certains font le choix d’une carrière à l’étranger. L’occasion de se faire la main dans le métier, de travailler dans un endroit paradisiaque, mais aussi d’être moins taxé qu’en Belgique.
Partir travailler à l’étranger est un sujet d’actualité brûlant dans le monde de la kinésithérapie, estime Manuel Jacquemin, président de l’Union des Kinésithérapeutes de Belgique (UKB). Le secteur sert de modèle pour étudier la facilitation des démarches pour s’installer dans les autres pays européens, car certains rencontrent des pénuries et d’autres non. En attendant, c’est surtout la France qui attire. Pour des questions géographiques et de langue, mais aussi de forte demande dans les déserts médicaux. Si le SPF santé publique dispose de d’informations sur les dispensateurs de soins étrangers qui exercent en Belgique, l’inverse est plus difficile à calculer, indique l’INAMI.
Cadre de vie
Pour les jeunes, ce sont surtout les îles françaises (La Réunion, Martinique, Guadeloupe) qui ont le vent en poupe, et ce depuis de nombreuses années. Comme beaucoup d’autres jeunes kinés, c’est à La Réunion que Marie a décidé de débuter sa vie professionnelle. «Pendant mes études, je n’ai pas eu l’occasion de faire un stage à l’étranger et j’avais envie d’avoir une expérience différente de la Belgique. Je ne me sentais pas légitime de me lancer directement en tant que kiné indépendante.» Si la langue et des raisons personnelles l’ont poussé à faire ce choix, le cadre de vie joue également: «Le week-end, on se sent en vacances. Cela change complètement la vision du travail.»
Avec, aussi, une taxation moins élevée qu’en Belgique. «En tant que kiné indépendante, les séances sont un peu moins bien rémunérées en France, mais dans les îles, il y a un abattement de 30% d’impôts les premières années. C’est là que cela devient intéressant», confie-t-elle. Au niveau honoraire «ça suit, mais c’est pas là qu’ils vont faire fortune», réagit Manuel Jacquemin. Contrairement au Luxembourg et à la Suisse qui attirent énormément pour des questions salariales, mais aussi de bien meilleures infrastructures.
Moins taxé
Rachid a de son côté une expérience multiple: au Liban, son pays d’origine, mais également en Belgique, en France et au Canada. «Au niveau du salaire, cela dépend des taxes. Le Liban est moins taxé que l’Europe ou le Canada, mais la prise en charge des patients est différentes.» En Europe, notamment en France, le secteur de la kiné est sous tension et la demande est importante. «C’est pourquoi ils essaient d’attirer les candidats, en offrant par exemple un logement temporaire le temps de s’installer.»
Le Canada, plus précisément le Québec, c’est le choix que Frédérique a fait en 2006, suivant son conjoint qui voulait changer de vie. La pratique y est différente. «Je travaille sans prescriptions médicales et j’émets des reçus pour les compagnies d’assurances privées. Le tarif est de 60 $ à 80 $ /h environ, il n’y a pas de barème, on demande ce qu’on veut. Et on a le droit de faire de la publicité. Au niveau fiscal, il n’y a pas de lois sociales, seulement des impôts.»
Manuel Jacquemin déplore cette fuite des talents, mais la comprend: «On est fort taxés ici. La Belgique francophone ne fait rien pour garder ses talents.»