La Wallonie tente de boucher les trous des passoires énergétiques. Les bâtiments résidentiels aux faibles performances, classés PEB G, ne pourront plus être mis en première location dès le 1er janvier 2025. Si l’indicateur est imparfait et parfois décrié, il reste un outil comparatif utile.
Ce ne sont que sept petites lettres, de A à G, mais elles vont dicter un calendrier important. Les maisons et appartements mal classés sur l’échelle de la performance énergétique du bâtiment (PEB) devront grimper les échelons au cours des prochaines années.
Une première date butoir approche, ce 1er janvier 2025, avec l’interdiction émise par la Wallonie de mettre en location des biens PEB G, les plus mauvais. L’interdiction concerne uniquement les premières mises en location, ce qui limitera forcément le nombre de biens concernés. Mais elle sonne le début de la traque aux passoires énergétiques.
Trois ans plus tard, ce sont les locations des biens classés F qui seront frappées de la même interdiction, suivies trois ans après par les PEB E etc. Pour les biens qui sont déjà loués actuellement, l’obligation interviendra au moment du changement de locataire, également tous les 3 ans, mais à partir de 2027, où il faudra un label F au minimum.
Du côté des achats, à partir du 1er juillet 2026, les nouveaux propriétaires de bâtiments labellisés PEB G, F ou E devront atteindre le label PEB D dans les cinq ans. De plus, toutes les habitations devront posséder une certification PEB d’ici à 2028.
La certification PEB est la seule qui permet en une lettre de connaître la quantité d’énergie nécessaire pour répondre aux besoins énergétiques «normalisés» d’un bâtiment. Un outil comparatif simple, à l’instar des labels énergétiques qui colorent les frigos, télévisions et autres appareils ménagers dans les magasins, également affublés de lettres et d’une couleur allant du rouge au vert.
Avec son calendrier, la Wallonie ambitionne d’améliorer, d’ici 2050, les performances énergétiques de l’ensemble du parc de logements de son territoire. Avec un objectif clair: atteindre en moyenne le label A, en visant en priorité la rénovation des logements les moins performants.
Encore un bien sur cinq au label G
Les derniers chiffres publiés par la Wallonie montrent la proportion encore importante du bâti mal classé. Sur l’ensemble des biens mis en vente ou en location, hors bâtiments récents (ceux postérieurs à 2010), dans la période allant de 2011 à 2022, environ 27,2% présentaient la plus mauvaise classification.
En plongeant dans le détail des chiffres, la situation s’est néanmoins améliorée. En 2011, 36,8 % des logements mis en location ou vendus étaient pourvus d’un label PEB G, alors qu’en 2022, ce chiffre s’élevait à 21,4 %. Soit une amélioration notable, mais qui représente toujours un peu plus d’un logement sur cinq.
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Le Brabant wallon compte le moins de biens classés G (12,8%), alors que le Hainaut est à la traîne, avec près d’un bien sur quatre dans cette classification, selon les données les plus récentes du Département de l’Énergie et du Bâtiment durable du SPW. Le travail de mise à niveau peut donc varier énormément d’un endroit à l’autre.
Quelle fiabilité pour le label PEB?
Entreprendre des travaux sur base d’une certification jugée floue frustre certains propriétaires et futurs acquéreurs. Le label PEB est parfois décrié pour son côté trop théorique. Jacques Claessens, professeur émérite de la faculté d’architecture à l’UCLouvain, lui reconnaît des limites mais une vraie utilité malgré tout. «La fiabilité du calcul de la PEB peut évidemment être questionnée, déjà parce qu’elle est régionalisée et donc différente d’un endroit à l’autre du pays. Ensuite, sans preuve de la présence d’isolant par exemple, elle considère que celui-ci n’existe pas s’il n’est pas visible. Enfin, elle sert assez peu également à connaître la consommation réelle attendue d’un bâtiment, qui dépend des habitudes de chacun et du confort souhaité. En revanche, elle permet un vrai comparatif entre plusieurs biens, avec des critères connus, mesurés identiquement et avec une normalisation de l’utilisation énergétique. C’est essentiel sur le marché.»
La PEB, qu’on peut estimer sur mon quickscan.be, a également remis la balance plus en faveur des locataires/acheteurs avance l’expert. «Avant, un propriétaire-bailleur n’avait que peu d’intérêt à investir pour isoler un toit par exemple, c’était de toute façon le locataire qui payait la facture de chauffage. Aujourd’hui, un bien avec une mauvaise performance énergétique est déprécié. Et ce tant sur le marché locatif qu’à l’achat. Cela donne donc aux acheteurs la possibilité de payer le bien moins cher pour avoir une enveloppe pour des travaux justement.»
Les points noirs des certificats PEB émis actuellement restent l’isolation (toiture, fenêtres, murs…). L’enveloppe des bâtiments est classée majoritairement «très mauvaise» et «mauvaise», et ce dans l’ensemble des provinces wallonnes. En Wallonie, elles comptabilisent respectivement 38,4 % et 42 % de l’ensemble des certificats délivrés entre 2012 et 2022, avance le dernier rapport du Centre d’Etudes en Habitat Durable de Wallonie.
L’isolation peut sembler présenter un retour sur investissement assez long, parfois 15 à 20 ans, donc moins intéressant, mais elle permettra peut-être de regagner de l’argent ailleurs aussi. Le remplacement ultérieur d’une chaudière, qui sera mieux dimensionnée au logement nouvellement isolé, coûtera forcément moins que de placer un énorme appareil énergivore, avance par exemple Jacques Claessens. Tout est dans tout en matière de construction et de rénovation.
Il faudra donc à l’avenir clairement isoler et encore isoler. Une priorité qui reviendra sans cesse ces prochaines années. Par la porte ou par la fenêtre.