A travers des voyages au Sénégal, en Palestine et en Caroline du Sud, l’essayiste Ta-Nehisi Coates développe les raisons de la discrimination des Afro-Américains.
Enfant d’un «papa qui dit qu’il lit pour apprendre», Ta-Nehisi Coates, devenu journaliste et essayiste couronné par le National Book Award en 2015, a nourri un rapport particulier avec les histoires qui, si elles pouvaient expliquer son monde, lui permettaient aussi de s’en évader. Celles que Ta-Nehisi Coates relate dans son essai Le message (1), paru en 2024 aux Etats-Unis, contribuent à la première finalité à travers la recherche de la vérité.
Au Sénégal, l’auteur afro-américain vit une expérience unique en sentant filer entre ses doigts l’eau de l’Atlantique: «Je crois n’avoir jamais éprouvé un tel sentiment de victoire dans ma vie. J’avais l’impression d’avoir vaincu l’Histoire. Je pensais au nombre exponentiel de mes aïeules, arrachées à cette partie du monde pour être emmenées sur le vaste océan.» Aux côtés de «ses sœurs et frères perdus» retrouvés à Dakar, il comprend partager un même destin: «Ici et ailleurs, nous, les Noirs, sommes victimes de l’Occident: un peuple qu’il laisse à la porte de ses déclarations progressistes, mais garde assez près pour le maintenir sous le charme de ses promesses».
En Caroline du Sud, dans cet Etat américain où des élus s’évertuent à retirer des bibliothèques les ouvrages dont il est l’auteur, Ta-Nehisi Coates apporte son soutien à Mary Wood, professeure de lycée dans la petite ville de Chapin, qui se bat contre la décision de la direction d’interdire l’étude de son livre Une colère noire (Autrement, 2015). «Nous vivons sous l’hégémonie d’une caste qui a régné sur la culture américaine avec une croix enflammée pendant si longtemps que nous avons tendance à négliger la portée d’une telle domination», en tire-t-il comme leçon même si l’enseignante aura gain de cause.
«Jamais je n’ai vu un monde qui brillait d’une lumière aussi vive que la Palestine.»
En Israël et en Palestine, dernière étape du voyage, l’auteur observe qu’«un peuple persécuté, pourchassé et victime d’un génocide à l’échelle industrielle (…) a retrouvé le chemin du foyer que Dieu lui avait donné». Mais, à Ramallah et à Hébron, il se rend aussi compte que ce même peuple prive les Palestiniens du droit à l’autodétermination dont lui a bénéficié. Et il rappelle les liens qui ont uni Israël et l’Afrique du Sud du temps de l’apartheid. Ce qui l’amène à dresser un parallèle entre le sort des Palestiniens et celui des Afro-Américains. Malgré cela, «parmi tous les mondes qu’il m’a été donné d’explorer, je pense n’en avoir jamais vu aucun qui brillait d’une lumière aussi vive et aussi immédiate que la Palestine», proclame l’essayiste. Une réflexion formulée avant le massacre du 7-Octobre en Israël et la guerre destructrice à Gaza.
(1) Le message, par Ta-Nehisi Coates, Autrement, 256 p.














