Après son succès fulgurant en mai dernier, l’émission de «politique-divertissement» Het Conclaaf revient avec un nouveau format. Ce second volet, dont la diffusion est prévue le 8 décembre, fait intervenir quatre négociateurs de l’Arizona.
Un total de plus de 2,6 millions de téléspectateurs. Les quatre épisodes de Het Conclaaf, diffusés fin mai sur la chaîne privée VTM, ont frôlé les records d’audience au nord du pays. Un carton qui tient notamment à l’originalité du programme: le temps d’un week-end, les producteurs avaient rassemblé sept ténors de la politique flamande (Alexander De Croo pour l’Open VLD, Bart De Wever pour la N-VA, Tom Van Grieken pour le Vlaams Belang, Sammy Mahdi pour le CD&V, Conner Rousseau pour Vooruit, Petra De Sutter pour Groen et Raoul Hedebouw pour le PTB-PVDA) dans un château niché au fin fond de la Wallonie. Entre un repas spaghetti et une session d’observation ornithologique, les leaders politiques y avaient confronté leurs visions sur différentes thématiques d’actualité, laissant place à quelques invectives et règlements de compte.
Fort de ce succès, le réalisateur Eric Goens a décidé de remettre le couvert avec un nouvel épisode, programmé le 8 décembre. Avec, cette fois, un concept un peu différent: quatre Bekende Vlamingen, parmi lesquels la gymnaste Nina Derwael, font office de résidents principaux du château et reçoivent une flopée de convives. Quatre des cinq négociateurs de l’Arizona foulent notamment la campagne wallonne: le formateur Bart De Wever, à nouveau accompagné de Conner Rousseau et Sammy Mahdi, ainsi que Georges-Louis Bouchez (MR) en invité surprise.
Problème de timing?
Si rien n’a fuité au sujet des thématiques abordées, le timing du tournage – en pleines négociations fédérales – pose question. Selon nos confrères du Standaard, la séquence aurait été enregistrée dimanche dernier, le 17 novembre. Soit un jour avant la reprise des tractations en vue de former une coalition Arizona, réinitiées grâce au retour du socialiste Conner Rousseau à bord du navire. «Je ne sais pas si on peut nécessairement y voir un problème éthique, nuance Dave Sinardet, politologue à la VUB. Les quatre présidents de parti étaient déjà d’accord pour reprendre les discussions ensemble. Si le tournage avait eu lieu la semaine précédente, cela aurait été bien plus problématique, car à ce moment-là, le blocage était complet.» La piste d’une coalition Lagon, avec l’Open VLD en remplacement de Vooruit, était d’ailleurs évoquée à l’époque.
Pour le politologue, l’interview de Georges-Louis Bouchez à Het Laatste Nieuws et la participation de Conner Rousseau à différents débats le week-end dernier sont davantage interpellantes. «Leurs propos auraient pu miner la reprise des discussions, alors que la demande du formateur était de rester discret dans la presse. L’épisode de Het Conclaaf, lui, ne sera diffusé que dans deux semaines et ne devrait pas avoir d’impact négatif sur les négociations. »
La participation à une émission de divertissement en pleins pourparlers démontre en tout cas l’importance, pour les politiques, d’apparaître continuellement dans les médias, estime Dave Sinardet. «Cette génération-ci de négociateurs entretient vraiment une relation différente avec le monde médiatique, contrairement aux années Dehaene où le mot d’ordre était « pas de commentaire », rappelle le politologue. Aujourd’hui, les politiciens doivent constamment soigner leur image, même en dehors des campagnes électorales.»
Het Conclaaf: une tradition flamande
D’autant qu’un programme populaire comme Het Conclaaf touche un public différent de celui des traditionnels débats politiques du dimanche. «Cela permet de capter des téléspectateurs plus jeunes ou habituellement déconnectés des sphères politiques», estime l’expert de la VUB, qui met toutefois en garde quant à l’impression de spontanéité qui se dégage du programme. «Certes, le contexte du château offre une dynamique différente de celle d’un débat de vingt minutes sur un plateau de télé, mais les négociateurs restent tous entourés de professionnels de la communication, qui connaissent les enjeux de l’émission et ont élaboré toute une stratégie. Cette pseudo-authenticité est finalement faussée.»
Ce nouveau volet de Het Conclaaf surfe sur la vague du succès du politainement, qui marie la politique au divertissement. Un genre dont la Flandre est pionnière, rappelle Dave Sinardet. «Depuis une trentaine d’années, on voit des politiciens participer à des télé-crochets aux côtés de chanteurs, d’acteurs et de sportifs, où le curseur de l’amusement est placé très haut.» Bart De Wever a d’ailleurs forgé sa notoriété grâce à sa participation à l’émission De Slimste Mens ter Wereld, qui a comptabilisé des millions de vues. Conner Rousseau s’est également illustré dans «The Masked Singer» en 2022.
Durant la campagne électorale, les médias francophones ont également goûté à la politique-divertissement, à travers deux concepts plutôt farfelus. Dans «Politic Challenge», diffusé mi-mai sur le compte TikTok «Mise à Jour» de la RTBF, les figures de proue des partis francophones avaient été invitées à répondre aux questions des primo-votants à bord d’une attraction à sensation forte. De son côté, RTL avait opté pour une «pyjama party» avec différents représentants politiques, enregistrée dans le kot d’un étudiant de 21 ans. Deux émissions au succès bien plus limité que Het Conclaaf.
@rtlplay Raoul Hedebouw et Hugo font un clip de rap 🎤 “Pyjama Partis” c’est sur RTL play 🎬 #pyjamapartis #humour #rap #clip #politique #election #vote #9mai @Hugo Neyt @RTL info ♬ son original – RTLplay