Une influenceuse croque une tablette de chocolat dans sa voiture et voilà que la TikToksphère s’emballe. Le fabuleux destin du chocolat Dubaï, quelques carrés à la crème de pistache que les internautes s’arrachent.
Trois cents euros, c’est le prix d’un smartphone, d’une montre, d’un petit électroménager, d’un vélo. C’est aussi celui de la version premium d’un dessert «made in Dubaï». Propulsée par les réseaux sociaux, la tablette XXL s’est imposée ces derniers mois comme l’un des produits de consommation les plus tendance. Sur TikTok, des milliers d’internautes à travers le monde partagent leur excitation d’avoir mis la main sur l’un de ces précieux lingots chocolatés, comme s’ils avaient dégoté le ticket d’or dans un chocolat Wonka, avant de rompre la tablette, de planter leurs dents dans le coulis vert gluant et de valider le produit par un «Mmmh» de plaisir intense. D’autres proposent des recettes et des tutos pour reproduire à la maison le goût authentique du chocolat Dubaï.
D’où sort cette «Dubaï chocolate» mania? L’engouement pour la tablette fourrée à la crème de pistache et à la pâte de cheveux d’ange emblématique de la pâtisserie orientale n’est pas tant lié à son goût (aussi bon puisse-t-il être) qu’à un coup de pub presque fortuit. C’est une influenceuse culinaire, Maria Vehera, qui a propagé le virus. En 2024, elle a posté sur le réseau social une vidéo ASMR (une technique de relaxation) dans laquelle elle se délecte de ce chocolat commercialisé depuis 2021 par la chocolaterie dubaïote Fix (pour «Freakin’ Incredible eXperience») Dessert Chocolatier. L’aspect atypique de la tablette a intrigué les internautes, à tel point que la vidéo est devenue virale, atteignant rapidement les 100 millions de vues.
Softpower
Que ce chocolat provienne des Emirats arabes unis, dont les plus hauts gratte-ciel du monde et les gigantesques centres commerciaux ont attiré 18,7 millions de visiteurs internationaux en 2024, a sans doute joué dans la viralité. Un formidable outil de softpower pour cet Etat dont le régime est régulièrement accusé de violer les droits humains. Au point que le cheikh Hamdan bin Mohammed bin Rashid Al Maktoum, prince héritier de Dubaï, s’est associé à Fix Dessert Chocolatier pour créer une nouvelle saveur exclusive.
Ce succès, à en croire la fondatrice de la chocolaterie dans un entretien à CNN, n’aurait rien de providentiel puisque son entreprise fait bien plus que produire une «simple barre chocolatée»: elle propose «une expérience». Un mot aussi doux à l’oreille du consommateur qu’un carré fondant à son palais.
Installée à Dubaï depuis neuf ans, l’anglo-égyptienne Sarah Hamouda a expliqué à la chaîne américaine qu’elle s’était laissée inspirer par ses envies de grossesse et qu’elle avait voulu créer quelque chose de plus que la simple dose de chocolat «classique». Le résultat? Cette barre XXL avec des motifs colorés peints, vendue un peu plus de 20 euros pièce. Sa production artisanale a rapidement été dépassée par la demande. La capacité journalière de 500 commandes étant systématiquement atteinte dans les minutes suivant l’ouverture de la vente en ligne, chaque jours à 17 heures.

Des chocolatiers qui salivent
Devenue une denrée rare, la tablette dubaïote a vu son prix grimper en flèche sur les sites de vente en ligne. Alléchés par cette succes story improbable, d’autres chocolatiers se sont rapidement essayés à la fabrication du fourrage croustillant.
Lindt fut le premier à proposer une tablette inspirée de celle commercialisée par Fix Dessert Chocolatier et vendue à près de dix euros. D’autres lui ont depuis emboîté le pas. Même l’enseigne discount Lidl a cédé à la tentation en proposant une version plus démocratique (cinq euros).
En Alsace, la chocolaterie Fortwenger a été submergée par les commandes de ses lapins de Pâques verts inspirés du chocolat de Dubaï. Les 900 premiers exemplaires sont partis en trois jours.
Ce n’est toutefois pas la première fois que les internautes s’arrachent une tablette pour imiter leur influenceur préféré. MrBeast, l’Américain aux 372 millions d’abonnés, devenu numéro un mondial sur YouTube, a fondé, en 2022, Feastables, sa propre entreprise spécialisée dans les barres chocolatées. L’an dernier, elle engrangé 250 millions de dollars de chiffre d’affaires, et plus de 20 millions de bénéfices. Aujourd’hui, le Youtubeur gagne plus d’argent avec ses tablettes qu’avec ses vidéos.