jeudi, décembre 26

L’essentiel

· Le surtourisme est devenu un fléau pour certaines destinations prisées depuis la fin de la pandémie de Covid-19.
· Cette surfréquentation touristique entraîne de multiples désagréments, notamment pour la population locale.
· Pour faire face à ces problèmes, certaines destinations ont mis en place des mesures telles que des quotas de visiteurs, des systèmes de réservation obligatoire, des taxes touristiques, des billets d’entrée journaliers, l’interdiction des bateaux de croisière…
· Certains experts estiment que les solutions les plus efficaces sont celles basées sur des indicateurs objectifs de surfréquentation plutôt que sur une simple perception de trop-plein de visiteurs.
· Le « démarketing » est également utilisé pour limiter l’attrait de certaines destinations.

Le surtourisme, fléau de l’ère post-pandémique? Pour endiguer leur surfréquentation, certaines destinations prisées imposent désormais des mesures drastiques à leurs visiteurs. Petit tour d’horizon à travers le globe.

«Tourists, go back home!». L’image a fait le tour du monde: samedi 6 juillet, des centaines de Barcelonais ont défilé dans les rues de la capitale catalane, fusils à eau à la main, pour asperger les touristes attablés en terrasse. Une image forte, symbole de l’exaspération de la population locale face à la horde de visiteurs déambulant quotidiennement sur les Ramblas.

Une manifestation dans les rues de Barcelone contre le surtourisme, le 6 juillet. © Europa Press/ABACA

A l’instar de Barcelone, de plus en plus de villes européennes (mais pas que) déplorent le surtourisme dont elles sont la cible depuis la fin de la pandémie de Covid-19. Un concept apparu récemment, au contraire du tourisme de masse dont l’origine remonte à près d’un siècle. «L’instauration des congés payés en 1936 en France et en Belgique a entraîné l’accès du plus grand nombre aux voyages, grâce à la démocratisation et la multiplication des moyens de transports, l’apparation de l’aviation lowcost et des hébergements à bas coûts», explique Alain Decrop, professeur en économie du tourisme à l’UCLouvain. Le surtourisme, par contre, est lié à la capacité d’un lieu à accueillir de visiteurs. «On parle de surtourisme à partir du moment où une attraction, une région ou un site est dépassé en termes de capacités d’absorption, en se référant à certains indicateurs comme le rapport entre la densité de touristes et la densité de la population locale ou entre le nombre d’hébergements touristiques et d’habitants dans un village.»

Des désagréments en cascade

Cette surfréquentation touristique entraîne dans son sillage son lot de nuisances. Outre les conflits avec la population locale, elle peut menacer la biodiversité et les écosystèmes, mettre en péril le patrimoine ou encore faire flamber le marché locatif. «La multiplication de résidences secondaires et d’hébergements touristiques peut faire fuir les locaux et transformer certains lieux en villages fantômes, note Cédric Maillaert, professeur en tourisme durable à l’Ephec et fondateur d’HikeUp.be (entreprise d’accompagnement en tourisme durable). Tout le service à la population est alors menacé, car il n’y a plus assez d’impôts pour financer les écoles, les transports en commun ou la gestion des déchets, pourtant générés par les touristes.»

Pour faire face à ces désagréments, les destinations touristiques ont désormais recours à une série de solutions. Des quotas sont parfois imposés sur certains sites pour limiter l’afflux de visiteurs, tout comme des systèmes de réservation obligatoire. Dans certains pays, des taxes touristiques (à Bali, notamment) ou des billets d’entrée journaliers (à Venise, par exemple) sont désormais en vigueur. Les bateaux de croisière, qui abritent généralement des milliers de touristes, sont également proscrits de certaines villes portuaires. Pour préserver le marché locatif local, certaines régions ont également régulé les locations de courte durée.

Cliquez sur les croix dans la carte du monde ci-dessous pour découvrir quelles mesures certaines destinations touristiques ont mis en place pour dissuader les visiteurs de s’y rendre en masse.

«Désinfluencer» certaines destinations

«Certaines solutions sont moins démocratiques que d’autres, déplore Cédric Maillaert. Les taxes ou les billets d’entrée sont des mesures purement économiques, qui profitent malheureusement à ceux qui ont le plus de moyens.» Et d’ajouter: «Le surtourisme est parfois brandi comme argument ou comme excuse pour imposer des mesures qui traduisent en réalité un certain mépris de classe.» Pour le professeur en tourisme durable, les solutions les plus efficaces sont celles qui sont objectivées, basées sur de vrais indicateurs de surfréquentation et non sur une simple perception d’un trop-plein de visiteurs. «Il y a aujourd’hui une tendance au tourism-bashing, regrette Cédric Maillaert. Evidemment, quand l’afflux de visiteurs menace la biodiversité ou un site protégé, il faut intervenir. Mais toutes les régulations ne sont pas bonnes à prendre.»

Pour limiter l’attrait de certaines destinations à la mode, le «démarketing» a également la cote. Il consiste à soit à arrêter la promotion touristique (ou en optant pour la promotion de circuits alternatifs), soit à lancer de véritables campagnes de communication dissuasives, à coups d’images de ruelles bondées ou de plages saturées par les parasols et les déchets relayées par des influenceurs. Une mesure dans l’ère du temps, à en croire une récente étude de FlightHub, qui révélait que plus de 40% de la génération Z choisit sa destination de vacances en fonction de son potentiel «instagrammable».

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