jeudi, novembre 14

Les enseignants ont droit à quinze jours de maladie par an, contre 30 dans le secteur privé. Mais contrairement au privé, ils peuvent les cumuler d’année en année. Avec l’introduction du CDI, est-ce fini?

La ministre Valérie Glatigny (MR) l’avait affirmé dès son arrivée à l’Enseignement obligatoire: son obsession sera d’«accroître l’attractivité de la profession et d’ancrer l’enseignant dans le métier». Pour atteindre cet objectif, le Graal qu’est la nomination serait remplacé par un contrat à durée indéterminée (CDI), plus accessible et décroché plus rapidement. Sur le principe, c’est désormais acté. Le fameux CDI s’appliquera aux enseignants qui entreront en fonction à la rentrée 2027. Ceux qui seront formés en quatre ans en 2027 ne pourront plus être nommés. Ceux qui, à cette date, ne sont pas nommés, bénéficieront d’une période de transition. Enfin, pour les nommés, aucun effet rétroactif ne sera appliqué. «On proposera un paquet de mesures par rapport à la pension, aux congés de maladie, à la progression dans la carrière pour que tous les avantages de la nomination soient préservés», précise Valérie Glatigny.

Voilà, en résumé, la mesure jugée comme un «coup de poignard» par les syndicats des enseignants. Ils pointent la volonté de faire des économies. Parce qu’en supprimant la nomination, on réduirait les avantages qui lui sont liés, dont, outre des aménagements de fin de carrière et une pension plus élevée, un régime de congés de maladie.

La mesure de suppression du système serait très explosive.

L’enseignant (nommé et temporaire) a droit à quinze jours (ouvrables) par an quelle que soit sa charge horaire (temps plein, mi-temps, etc.). Cette «cagnotte», si elle n’est pas utilisée, en partie ou en totalité, peut être accumulée d’année en année pour constituer un capital, plafonné toutefois à 182 jours, soit une année scolaire. Un capital qu’il peut activer lorsqu’il est malade (couvert par un certificat médical) et ce, sans perte de salaire. Un régime qui pousserait des profs à partir sous couverture médicale six mois, voire un an, avant la pension. Or, ces prépensions qui ne disent pas leur nom coûtent évidemment de l’argent: les malades restent à charge de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB), qui doit aussi payer un remplaçant. «Un agent sous certificat délivré par un médecin est un agent malade, et je n’en connais pas d’autres!», répond Luc Toussaint, président de la CGSP-Enseignement, qui précise que «ce plafond est spécifique aux enseignants francophones. Il n’existe ni chez nos collègues flamands ni dans d’autres fonctions publiques». Pour lui, le système est «justifié, au vu de la pénibilité du métier et de l’allongement effectif de la carrière». Il ne présente pas que des avantages, selon le syndicaliste. En comparaison, dans le privé, la durée de protection s’élève à 30 jours de maladie indemnisés à 100%. Une fois son quota épuisé, l’enseignant, lui, est mis en disponibilité et perçoit 80% de son traitement durant douze mois, 70% les douze mois suivants et 60% au-delà de 24 mois.

Abolir ce système de capitalisation de congés de maladie n’est pas spécifiquement inscrit dans la Déclaration de politique communautaire (DPC). «Mais dès lors que le gouvernement adopte une logique de suppression de statut et qu’il instaure un CDI, c’est sous-entendu», tranche Luc Toussaint. Interrogé sur une fin éventuelle de ce dispositif, le cabinet Glatigny estime qu’il est «trop tôt pour y répondre». «Tout ça est à discuter, répond Johanne Moyart, directrice de la communication et porte-parole. En revanche, il ne s’agira pas d’un CDI copier-coller, mais d’un CDI sur mesure

Ce que l’on sait, en revanche, c’est que le passage de la nomination au CDI ferait peser la charge des périodes de maladie (au-delà de 30 jours) sur le budget fédéral plutôt que sur celui de la FWB. Quelle serait l’économie? Difficile à estimer. Les syndicats citent le chiffre de 100 millions par an, en régime de croisière.

Un régime de congés sur le sellette aussi ailleurs

La volonté de supprimer le cumul des jours de maladie est dans l’air depuis plusieurs années. Mais les ministres n’ont jamais concrétisé leurs intentions. Ainsi, en 2018, le gouvernement de Charles Michel n’a pas réussi à vaincre les réticences syndicales. L’abandon est à nouveau visé dans la «supernote» proposée par le formateur Bart De Wever. L’idée est de clôturer ce régime à partir du 1er janvier 2026 pour passer à une assurance incapacité/invalidité, à l’instar de ce qui se fait dans le secteur privé. Les fonctionnaires fédéraux ne pourraient donc plus «épargner» des jours de maladie en vue de partir plus tôt à la pension.

Actuellement, tout agent statutaire des administrations, des corps spéciaux (policiers, pompiers) et des entreprises publiques a droit à 21 jours (calendrier) de congé de maladie par an, moyennant un certificat (30 jours au sein de la police). Après ce délai, son traitement est raboté à 60%. Ces jours sont également «capitalisables». Au bout de dix ans d’ancienneté, par exemple, celui qui a une santé de fer aura accumulé 210 jours.

Alors, est-ce bientôt fini? La mesure serait explosive, très. Dans une interview à La Première (RTBF), Valérie Glatigny estime que, sur ce sujet, «il existe, au sein de la population, une certaine incompréhension», ajoutant que «le plus important est de valoriser le métier, y compris aux yeux du public et de rappeler le rôle central que joue l’enseignant dans notre société».

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