dimanche, octobre 27

Le vote obligatoire doit être vu comme un moyen, et non comme une fin en soi.

Quatre mois s’étaient écoulés depuis les élections et il n’y avait toujours pas de nouveau gouvernement. A quoi sert l’avis des citoyens? A quel point les partis qui les courtisaient voilà peu en tiennent-ils compte? J’en étais presque résolu à ne pas aller voter aux communales. C’est un ami, lui-même candidat, qui m’a fait changer d’avis.

Je lui avais partagé mes désillusions, mon aversion de plus en plus forte envers cette obligation incompatible, me semblait-il, avec la liberté qui est un des fondements de nos démocraties. Et puis, voter me paraissait tout simplement de moins en moins utile. Habilement, il ne s’est pas opposé à mon discours. Il a surtout pointé les avantages conférés par cette obligation, plutôt théorique de toute façon, puisque les pénalités prévues par la loi ne sont pas toujours appliquées. Pour lui, cette règle incite un nombre plus important de citoyens à voter et en conséquence, espère-t-il, à s’intéresser à la chose publique. Les résultats seraient ainsi mieux représentatifs du choix des citoyens, principalement de ceux qui semblent moins intéressés par les débats publics: les jeunes, les personnes socioéconomiquement défavorisées… Je rétorquais que ce vote obligatoire risquait d’être peu réfléchi, sans réelle conviction. Au contraire me disait-il, cela ne fait certes pas de tous les citoyens des adeptes de la politique, mais cela permet au moins qu’ils ne décrochent pas complètement du débat public et cela entretient une culture de l’engagement citoyen. La démocratie n’est pas seulement un droit mais aussi une responsabilité. Il a surtout emporté mon adhésion lorsqu’il a ajouté qu’à la contrainte, il est crucial d’adjoindre un volet éducatif afin de permettre un engagement plus volontaire et plus informé. Le vote obligatoire doit être vu comme un moyen, et non comme une fin en soi, a-t-il asséné. Et c’est justement au niveau communal que l’impact du vote individuel est le plus visible. En bon tribun, il m’a donc convaincu.

Il ne suffit pas de contraindre, il est crucial d’y ajouter un volet éducatif.

Sans attendre, je me suis penché sur les listes et leur programme, sans oublier les médias. Et c’est là que le doute m’a à nouveau envahi. Je connaissais certains candidats, j’adhérais plus ou moins à leur programme… Mais que penser de la composition des listes? Certains, que je connaissais pour porter des idéaux a priori opposés, se retrouvaient colistiers. Désarçonné, j’ai à nouveau fait appel à mon ami candidat. Plus au fait des arcanes de la vie politique, cela ne le choquait pas. De son point de vue, les enjeux des élections communales sont plus pragmatiques qu’idéologiques. Que des membres d’un parti intègrent des listes indépendantes ou du bourgmestre, en plus d’être un atout majeur pour obtenir facilement une majorité, leur permet d’élargir leur base électorale. C’est pour cela que les candidats obtiennent souvent leur aval. Bien sûr, si une fois élus, ils ont tendance à défendre l’idéologie de leur parti, ils seront néanmoins tenus de respecter les accords conclus. Ils devront se montrer capables d’arriver à des compromis, capacité typiquement belge.

A nous, électeurs, de veiller au grain et de ne pas laisser passer des dérives extrémistes. S’il n’y avait cette souplesse, ces représentants d’idéaux parfois contradictoires, nous serions en dictature. Alors, oui, j’ai voté… mais je tiendrai à l’œil leurs réalisations.

Joseph Ndwaniye est infirmier et écrivain.

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