Il est étonnant de constater que les interdits posés d’un côté peuvent être transgressés de l’autre. En fonction des circonstances, on nouera des alliances avec le PTB ou on ne le fera pas, par exemple. C’est ça, être pragmatique.
«Comme l’eau se forme au récipient qui la contient, un homme sage s’adapte aux circonstances.» C’est une des innombrables citations de Confucius et, paraît-il, de nombreux habitants de l’Empire du Milieu qui seraient dotés de cette capacité d’adaptation. Les contingences de la vie requièrent une certaine malléabilité qui permet à l’homme sage de tirer son épingle du jeu.
Ainsi, le responsable politique se caractérise bien souvent, lui aussi, par sa capacité d’adaptation au contexte. Il y a, d’un côté, les principes avec lesquels on ne transige pas, et de l’autre, le pragmatisme qui impose que, parfois, on s’adapte néanmoins aux circonstances. Parce que nécessité fait loi, comme on dit.
Ce qu’on a dit un jour fait parfois l’objet d’un ajustement le lendemain. Ou l’interdit que l’on pose quelque part ne prévaut pas ailleurs, où le contexte est différent.
C’est ainsi que le PS s’est retrouvé à approuver quelques alliances avec les «couillons» d’autrefois (le PTB), parce que la situation l’imposait. Et ce qui était inconcevable hier, en dépit du signal de l’électeur, est rapidement devenu envisageable, en vertu du signal de l’électeur.
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A Mons, où le bourgmestre socialiste Nicolas Martin n’est pas réputé le plus à gauche de son parti, un accord de majorité verra cohabiter le PS, Ecolo et le PTB. Cela ne fait pas de lui un communiste, ni un écologiste d’ailleurs, se défend-il. Simplement, «un socialiste, tendance sociale-démocrate» qui forme des coalitions, comme cela se fait en Belgique, avec des partenaires de bonne volonté.
En Région bruxelloise, une alliance similaire a vu le jour dans la commune de Forest. Il ne s’agit en rien d’une rupture du cordon sanitaire, qui n’encercle aucunement le PTB, mais du franchissement d’une ligne qui ne l’avait jamais été auparavant. Sauf à Zelzate ou à Borgerhout, en Flandre, où les socialistes néerlandophones ont gouverné à l’échelon communal au côté du PVDA. Mais c’est une autre histoire.
En province de Liège, une telle alliance ne pourra pas voir le jour, par principe, puisque l’accord conclu entre le PS, le MR et Les Engagés à la Province comprend une sorte de «clause anti-PTB», qui exclut tout accord d’un des trois partenaires avec le PTB, sur l’ensemble du territoire provincial. Entre Liège, le Hainaut et Bruxelles, on aura bel et bien fait preuve de malléabilité.
On notera que ces facultés d’adaptation s’observent au sein des autres formations politiques également. Non pas qu’elles choisissent de s’allier au PTB, cela ne ressemblerait plus à de la flexibilité, mais à du contorsionnisme. Mais ces partis-là, qui promettent les pires conséquences pour quiconque osera s’acoquiner avec les communistes, ne se privent pas non plus de s’adapter aux contextes locaux. Ainsi, si le MR et Les Engagés sont parvenus à empêcher le PS de nouer toute forme d’alliance avec le PTB en province de Liège, sous peine de rupture de l’accord de majorité provincial, cela n’empêche aucunement ces deux partis de négocier en Région bruxelloise et à la Province de Hainaut avec le PS, deux territoires dans lesquels il discute bien avec le PTB dans l’une ou l’autre commune. C’est cela aussi, l’adaptabilité qui sied à l’homme sage.
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