Le stock voué au pilon fait l’objet d’un litige entre l’ancien prestataire du fédéral, auparavant chargé de la distribution de vaccins et matériel anti-covid, et le SPF Santé publique. Saisi en urgence, un tribunal a tranché en faveur de l’entreprise. La destruction attendra.
Le 19 juillet dernier, le SPF Santé publique avait publiquement annoncé, par souci d’«optimisation de son stock stratégique», la destruction de quelque 8,6 millions de doses de vaccins anti-Covid, ainsi que des tests, réactifs, et médicaments, etc. Valeur totale: 207 millions d’euros. Un délestage inévitable, expliquait le SPF, du fait de la chute de la demande en vaccins, et pour éviter de «surstocker, car de nombreux produits ont une date de péremption et doivent inévitablement être détruits à un moment ou à un autre».
Mais voilà, ces médicaments et matériel obsolètes, dont nombre de vaccins périmés, dont le stockage demeure coûteux, font l’objet d’un litige entre le fédéral et son ancien prestataire Medista, l’ancien distributeur et «stockeur» officiel du fédéral avant d’être éjecté du marché à l’été 2022 suite à une offre publique que l’entreprise estime truquée (et qui vaut au SPF Santé publique plusieurs enquêtes de justice, sur fonds de soupçons de favoritisme et de conflit d’intérêts).
Factures contestées
C’est que, depuis le changement de prestataire, le SPF Santé publique, à qui Medista a facturé ce coûteux déménagement de doses vouées au pilon, renâcle à régler la facture, une procédure de recouvrement étant actuellement en cours au tribunal de première instance de Bruxelles. D’autres procédures concernant le règlement de factures diverses et variées sont également en cours. Or, en l’absence d’un inventaire indépendant et complet du stock, a fait valoir Medista, et a fortiori si le stock est détruit, comment trancher le(s) litige(s) ?
Saisi en urgence, le tribunal de première instance de Bruxelles a reconnu «qu’un tel inventaire est impossible si les marchandises en question sont détruites» et, «sans statuer pour l’instant sur l’utilité réelle de la mesure d’enquête en matière d’inventaire en question, le tribunal constate que la demande d’ordonnance de cette mesure d’enquête n’est pas manifestement non-fondée».
Un stock périmé sur les bras pendant des mois?
Résultat, le tribunal, d’après la copie du jugement obtenue par Le Vif, «impose à l’État belge, avec effet immédiat, l’interdiction de détruire ou de rendre indisponible de toute autre manière, directement ou indirectement, y compris avec l’aide de tiers, le stock (…) ou de les rendre indisponibles pour l’inventaire». Au moins, dit le jugement, jusqu’au 29 août prochain, date à laquelle un juge devra statuer si, oui ou non, la requête de Medista visant à mandater un expert indépendant pour inventorier le stock (et donc les produits potentiellement liés aux factures, et frais de déménagement contestés), est valable. Dans l’affirmative, le fédéral devrait alors conserver ce stock obsolète jusqu’à ce que l’inventaire soit effectué. Ce qui pourrait prendre des mois et coûter des dizaines de milliers d’euros.