La Commission devrait présenter les grandes lignes de sa vision pour l’agriculture et l’alimentation d’ici le 19 février. Fait rare: les ONG ont bon espoir que l’équité, tant économique qu’environnementale, prévale.
Simplification administrative, Mercosur, PAC (Politique Agricole Commune)… Depuis presqu’un an, le monde agricole européen est au bord de la rupture, en témoignent les centaines de tracteurs sillonnant à intervalles réguliers les rues de la capitale européenne.
Il fallait réagir, présenter un plan désirable pour les agriculteurs, mais sans renier ce qu’il reste du pacte vert européen, un sujet intimement lié à la fourche autant qu’à l’assiette. D’après un document obtenu par Le Vif (ainsi que par d’autres médias, dont nos confrères de Contexte), la Commission européenne va présenter dans le courant de la semaine prochaine (le 19) sa «vision» pour 2040. Le document pointe le «rôle vital que les agriculteurs jouent dans nos vies», tout en appelant le secteur alimentaire à contribuer «à devenir un secteur à faible émission de carbone, soutenant les objectifs climatiques de l’UE, tout en préservant des sols sains, une eau et un air propres, et en protégeant et en restaurant la biodiversité de l’Europe.»
Pacte vert préservé?
Bref, le pacte vert, boussole de la précédente législature, n’est pas complètement mort, et les ONG environnementales européennes s’en réjouissent. «Le dialogue stratégique de l’UE a bouleversé des discussions politiques longtemps bloquées pour produire ce que personne ne pensait possible: un large consensus», veulent croire certaines ONG, dont le Bureau européen de l’environnement (EEB), qui regroupe de nombreuses structures écologistes (pour la Belgique: Canopea, le BBL, Catapa, etc.).
Un secteur à faible émission de carbone, soutenant les objectifs climatiques de l’UE, tout en préservant des sols sains, une eau et un air propres, et en protégeant et en restaurant la biodiversité de l’Europe.»
«Si les puissances européennes à l’origine du processus mettent désormais en œuvre leurs recommandations, une majorité d’agriculteurs, d’économies rurales et d’écosystèmes pourraient bientôt constater des gains majeurs et rapides. Un test important aura lieu le 19 février, lorsque la Commission européenne présentera un ensemble de réformes, susceptibles d’inclure une interdiction des pratiques commerciales déloyales et de préparer le terrain pour un remaniement du colossal budget agricole du bloc (NDLR: près de 400 milliards d’euros sur six ans)», fait encore valoir l’EBB.
Simplification de la PAC
Concrètement, d’après le document que nous avons consultés, la Commission n’entend effectivement plus tolérer que les agriculteurs vendent à perte, assurant que les pratiques abusives seront investiguées. Pour cela, on se dirige — dixit le document — vers une révision de la directive UTP (pratiques commerciales déloyales), mais aussi sur une transparence accrue — et tout du moins, voulue — sur les coûts et marges de l’agro-industrie… une question qui, du Covid à aujourd’hui, continue d’agiter l’opinion publique sur fond d’inflation galopante.
Sans surprise, la simplification de la PAC est également au menu, pour une meilleure répartition des investissements publics, notamment envers les exploitations de petite et moyenne taille qui en ont le plus besoin. Une PAC que la Commission veut rendre «incitative», en particulier auprès d’une nouvelle génération d’agriculteurs — un renouvellement qui n’est pas acté et que la Commission appelle, là aussi, de ses vœux. A ce titre, les débouchés dans l’agroécologie pourraient attirer une plus jeune population, tente la Commission, qui rêve tout haut que de meilleures conditions de travail «attirent davantage de femmes vers la profession et garantissent la protection des droits des travailleurs dans les exploitations agricoles et tout au long de la chaîne de valeur alimentaire.»
Alignement pour les agriculteurs
Dès cette année 2025, la Commission prévoit ainsi un paquet de simplification du cadre législatif agricole actuel, notamment en vue de rationaliser le soutien aux exploitations de petite et moyenne taille. En attendant la mise en place d’un observatoire européen des terres agricoles, un alignement plus accentué des normes de production appliquées aux produits importés, sur les pesticides et le bien-être animal, une évaluation de la directive sur les nitrates (prévue pour 2025), le renforcement du rôle des marchés publics, la mise en place d’un «food dialogue» chaque année, sans parler d’un dialogue accru avec toutes les parties prenantes. Vu le programme, c’est en effet préférable…