Ce 1er février, les tarifs de la SNCB augmentent en moyenne de 5,9%. Une hausse justifiée par l’évolution de l’indice des prix à la consommation, mais qui intervient toutefois après une année noire pour la ponctualité sur le rail. Dans le détail, ce sont les tickets « courte distance » qui sont les plus touchés par cette augmentation.
Prendre le train coûtera plus cher à partir de ce 1er février. Après une hausse importante de près de 9% en 2023, les tarifs de la SNCB connaissent cette année une indexation moyenne de 5,9%. A l’exception des City Pass et du supplément vélo, l’ensemble des tickets est concernée par cette augmentation. Mais tous les navetteurs ne sont pas logés à la même enseigne [1].
Dans le détail, ce sont surtout les billets standards pour des courtes distances qui subissent la hausse la plus conséquente. Un trajet de 10 km en 2e classe coûtera désormais 3,00€, contre 2,80€ en 2023, soit une hausse de 7,1%. Ce même billet en 1ere classe se voit lui indexé de 8,3%, passant de 3,60€ à 3,90€. Les distances de plus de 40km sont proportionnellement moins impactées par cette augmentation. Un constat « logique », selon Bart Jourquin, professeur d’économie des transports à l’UCLouvain: « Le prix d’un billet intègre à la fois des coûts variables, en fonction de la distance, et des coûts fixes, par exemple pour l’accueil en gare. Ceux-ci sont les mêmes que vous parcouriez 5 ou 500km, donc s’ils sont indexés, c’est normal que l’augmentation se ressente davantage sur les tickets courtes distances, aux prix originellement plus bas. »
Les cartes de 10 trajets, notamment le Local Multi (+6,90% en 2e classe) ou le Standard Multi (+9,79% en 1ère classe) connaissent également des augmentations plus élevées que la moyenne. Les tickets seniors (+6,4%) augmentent aussi proportionnellement davantage que les tickets jeunes (+5,6%). Une tendance justifiée par un récent changement de paradigme. « Par le passé, de nombreuses campagnes publicitaires ciblaient les personnes âgées, rappelle Bart Jourquin. Aujourd’hui, la volonté politique est plutôt de séduire les jeunes avec des tarifs abordables. En habituant les jeunes générations à se déplacer en train, cela permet de fidéliser les clients sur le long terme. »
Tarifs de la SNCB: « Effet de ratrappage »
En dix ans, les prix ont par contre évolué bien différemment qu’au cours de l’année écoulée. Entre 2014 et 2024, ce sont plutôt les abonnements qui ont connu des hausses de prix majeures. Le pass 12 mois entre Bruxelles et Charleroi a par exemple augmenté de 40% en dix ans, contre « seulement » 21% pour un ticket standard sur la même période. Même constat pour un abonnement entre Namur et Marche-en-Famenne (+35%, contre 21% pour le billet classique). « Pendant très longtemps, la SNCB a préservé les coûts des abonnements, qui augmentaient à l’époque moins vite que les autres. Il y a désormais un effet de rattrapage, analyse Bart Jourquin. D’autant qu’aujourd’hui, la majorité des abonnements ne sont pas payés par les navetteurs eux-mêmes mais par les employeurs, peut-être davantage en mesure de supporter ces augmentations. »
Les indexations annuelles des tarifs de la SNCB interviennent toujours aux alentours du mois de février. Ces augmentations, dont les dispositions sont prévues dans le Contrat de service public que l’entreprise ferroviaire a conclu avec le gouvernement, intègrent l’évolution de l’indice des prix à la consommation et sont justifiées par la hausse des coûts salariaux et des prix de l’énergie.
Retards et annulations records sur le rail
Mais cette année, la pilule risque d’être particulièrement difficile à avaler pour les navetteurs en regard des piètres performances de la SNCB en termes de ponctualité. En 2023, plus d’un train sur dix (12,5%) accumulait au moins six minutes de retard. La SNCB a ainsi atteint son niveau de ponctualité le plus bas en cinq ans. Ce taux est d’ailleurs en chute libre depuis 2020, passant de 93,8% à 87,5%. L’année 2023 a également été marquée par des annulations records, avec plus de 46.000 trajets supprimés.
Ces performances à la baisse peuvent-elles décourager les Belges d’emprunter le rail ? « Les études démontrent que, de manière générale, les usagers sont prêts à payer des tarifs un peu plus élevés en échange d’un service de qualité, observe Bart Jourquin. Or, le niveau est ici clairement à la baisse et pose question. »
Droits d’usage à Infrabel
Malgré cette ponctualité en berne, la hausse des tarifs reste justifiée aux yeux du professeur en économie des transports. Outre les coûts précités, la SNCB doit supporter la hausse des droits d’usage à Infrabel, précise-t-il. « Pour faire rouler ses trains sur le rail, la SNCB doit payer une sorte de ‘péage’ à Infrabel, qui est en charge des infrastructures. Ces droits d’usage ont, eux aussi, été indexés. » Et de rappeler que l’ensemble des recettes perçues par la SNCB pour la vente des titres de transport couvre en réalité à peine 30% de ses coûts. « Le reste est pris en charge par l’Etat. »
Quoi qu’il en soit, cette hausse des tarifs risque de peser sur le portefeuille des Belges. A l’heure où la mobilité douce constitue une alliée de taille dans la lutte contre le réchauffement climatique, la gratuité des transports en commun doit-elle être envisagée? Pour Bart Jourquin, cette option n’est « ni une solution, ni un idéal ». « Cela risque d’entraîner des effets pervers, tels que l’augmentation des déplacements inutiles, estime le professeur. La gratuité séduit, mais cette mesure populiste loupe généralement sa cible et n’entraîne pas de report modal. »
[1] Pour choisir le billet le plus adapté, la SNCB invite les usagers à consulter son comparateur de tarifs sur son site internet.